Médias européens: Cafébabel, « en 15 ans on n’a pas vielli »

Dans le restreint panorama des médias pan-européeens, s’adressant à un public transnational sous un angle purement Européen, Cafébabel reste aujourd’hui le seul qui dépasse la politique et l’actualité de l’Euro-bulle de Bruxelles. Le réseau participatif d’auteurs et traducteurs tenant à cœur l’Europe des jeunes citoyens vient de fêter 15 ans à Budapest.

Tout avait commencé en 2001 à Strasbourg par l’initiative d’une poignée d’étudiants Erasmus. Aujourd’hui, Cafébabel compte 250 000 visiteurs uniques par mois et continue à permettre aux jeunes reporteurs européens de voyager à travers l’Europe pour la raconter en six langues. Après avoir écrit ce post célébratif le directeur et fondateur Alexandre Heully se confie au Natolin Blog.

Nicola Accardo : Comment avez-vous fêté les 15 ans de Cafébabel ? Pourquoi avez-vous choisi Budapest ?

Alexandre Heully : Hasard du calendrier, presque toute l’équipe de Cafébabel et les membres les plus actifs de notre réseau d’équipes locales, soit 23 personnes, étaient présentes à Budapest du 29 janvier au 1er février pour un séminaire sur les orientations stratégiques de Cafébabel sur… une péniche. Comme l’anniversaire tombait pile dans la nuit de dimanche à lundi, nous en avons évidemment profité pour faire la fête à Budapest ! Pour les 15 ans, nous avons décidé de marquer le coup : on prépare une vidéo gonzo qui dévoilera l’histoire de Cafébabel comme si vous y étiez, et le lancement d’une campagne de crowdfunding pour l’édition d’un livre qui rassemblera la crème des reportages et photos publiés sur Cafébabel.

NA : Comment va Cafébabel 15 ans plus tard, en termes de lecteurs et du réseau de contributeurs et traducteurs ?

AH : En 15 ans Cafébabel a beaucoup évolué. Nous sommes passés d’un projet initié par un groupe d’étudiants en sciences politiques qui voulaient changer l’Europe (et le monde d’ailleurs), à un magazine européen constitué d’une équipe de 12 professionnels à Paris qui coordonne le travail d’un réseau de 1500 contributeurs bénévoles à travers l’Europe. Que de chemin parcouru quand on y pense ! Et c’est vrai que c’est toujours un émerveillement de voir que la recette de Cafébabel d’un média européen multilingue et participatif fonctionne toujours auprès de nos journalistes, photographes et traducteurs bénévoles. L’âge moyen des contributeurs est de 27 ans et celui de nos lecteurs est de 28 ans : disons qu’on n’a pas trop vieillis !

NA : L’activité de journalisme participatif de Cafébabel compte en bonne partie sur le soutien du programme « L’Europe pour les citoyens » de l’UE. Les changements stratégiques de ce programme vous ont-ils affectés ?  Y a-t-il d’autres projets de financement à même de vous aider dans votre mission ?

AH : Le programme « l’Europe pour les citoyens » a en effet été repensé en 2014 : en gros, les dotations pour les organisations de la société civile qui portent des projets de citoyenneté n’ont pas vraiment été réduites, c’est surtout qu’il a été décidé d’affecter ces subventions à moins d’organisations. Du coup la concurrence est beaucoup plus rude. Pour ce qui concerne Cafébabel, nous avons réussi à maintenir – voire à augmenter – la contribution du programme dans notre budget global. C’est à la fois une bonne nouvelle, mais c’est aussi inquiétant dans la mesure où cette subvention vient compenser la baisse des subventions nationales.

NA : Comment avez-vous réagi à ça ? Quel est le nouveau mode de survie de Cafébabel ?

AH : Depuis plusieurs années, et cela ne date pas de 2014, nous sommes en réflexion constante sur la diversification de nos ressources : nous avons essayé les contenus papiers, la publicité, les prestations de services par exemple. Mais il faut reconnaitre que le cœur de l’activité de Cafébabel reste l’économie associative : notre ressource première, c’est le bénévolat. C’est pourquoi Cafébabel compte un large réseau de partenaires, des fondations en France et en Europe, mais aussi des institutions publiques françaises qui permettent de financer nos projets de reportages et des séminaires.

NA : Parlez-nous de vos programmes de reportage sur le terrain. Quel est votre bilan ? Sur quoi portent-ils les derniers ?

AH : Tous les ans Cafébabel envoie entre 35 et 80 jeunes journalistes sur le terrain. Pendant 5 jours, une équipe de journalistes venant des quatre coins de l’Europe se retrouve dans une capitale européenne pour réaliser des reportages on the ground. Pour 2015-2016, notre programme de reportages s’appelle EU Too. L’idée est de partir à la rencontre de la jeunesse européenne désenchantée. Qui sont ces jeunes qui contestent l’Europe et qui se tournent vers des idées alternatives ? Pourquoi se sentent-ils mal représentés ? Quelles sont leurs revendications ? Avec EU Too, nous voulons sortir de la bulle européenne, et nous intéresser à ceux qui contestent l’Europe : nous partons à leur rencontre, dans leurs villes, dans leurs quartiers.

NA : Quels ont été en 15 ans, les principaux achèvements de Cafébabel vis-à-vis de la citoyenneté Européenne ?

AH: Au même titre que les programmes Erasmus, Cafébabel agit un peu comme une potion magique sur les jeunes européens, comme un révélateur d’identité européenne. Ce que nous faisons est finalement assez simple : nous nous intéressons à comment les jeunes vivent l’Europe au quotidien, nous leur donnons la parole et proposons à nos lecteurs de lire l’Europe telle que nous la voyons. D’où notre slogan Europe in Real Life. Mais en 15 ans, ce que j’ai remarqué, c’est que l’utopie européenne qui nous animait à la création de Cafébabel s’est heurtée face au mur de la crise économique. Ce n’est pas un hasard si de plus en plus de mouvements nationalistes et populistes séduisent des jeunes. Chez Cafébabel, nous portons des valeurs d’ouverture, de curiosité, de créativité. Et notre façon de contribuer au projet européen, c’est de donner la parole à ces jeunes et d’apporter une lecture différente de celle que l’on trouve dans les médias traditionnels.

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